Qui donc est Véronique Doucet? Une artiste de la relève en arts visuels.
L'excuse pour vous la présenter, c'est le fait que durant tout le mois d'octobre, elle expose une de ses œuvres surprenante effectuée sur une pièce de métal ronde et rouillée au Cabaret de la dernière chance dans le cadre de l'exposition «Eau». Mais la vraie raison pour vous la faire connaître: son projet environnemental de performance artistique à l'ancien site minier Aldermac prévu pour mai 2005.
Installée à la campagne et entourée d'animaux de basse-cour, Véronique sort de son atelier et s'avance, sereine, accueillante, en harmonie avec son environnement. En ce doux vendredi matin d'octobre, elle présente clairement son projet qui la passionne et se décrit simplement.
«Je suis mère d'une enfant à temps plein et de deux à temps partiel...Je suis née à Arthabaska, dans les Bois Francs. J'ai vécu au Cap de la Madeleine, à Trois-Rivières, Québec, Montréal... et je suis installée avec mon conjoint à Évain depuis deux ans. J'ai un bac en Arts Plastiques visuels de l'Université de Montréal... Je veux créer au service de l'environnement.» Véronique Doucet est imprégnée de ce souci environnemental: son père est agronome, son frère possède une maîtrise en environnement et elle-même cumule plusieurs années d'expérience de travail dans le milieu forestier.
C'est toutefois par hasard que Véronique Doucet découvre l'ancien site minier Aldermac. À la recherche de souches pour créer une œuvre, on lui indique tout bonnement cet endroit où on lui promet de trouver ce qu'elle cherche. Il est situé entre Évain et Arntfield, tout près de chez elle, dans le Rang VI du canton Beauchastel.
Complètement renversée et consternée par ce qu'elle voit, elle se lance dans d'autres recherches et compile plusieurs informations troublantes. Il existe, en Abitibi-Témiscamingue, 79 sites comme celui-ci! Ce sont des sites prioritaires, c'est-à-dire qu'ils représentent un potentiel de risque pour la santé publique et risque élevé pour l'environnement et la faune. Les déchets toxiques de ce site orphelin se répandent par flottation des concentrés de minerais de cuivre, d'or et d'argent et ont déjà contaminé la rivière, le lac ainsi que la baie Arnoux. Le lac Dasserat, dont la baie Arnoux fait partie, risque de devenir complètement contaminé lui aussi. Bien que le site Aldermac ne soit plus en fonction depuis 1943, on estime à près de 100 ans la continuité de déversement des résidus toxiques. Mme Doucet croit que la gravière en exploitation aux abords du site Aldermac est probablement affectée ainsi que les eaux souterraines.
«À défaut d'avoir en poche sept millions de dollars, montant estimé pour la décontamination du site, je propose une alternative symbolique et artistique afin de réduire l'érosion... causée par le vent et les eaux de ruissellement qui acidifie les cours d'eaux qui se rattachent à Aldermac. Je considère que nous sommes rendus à l'ère de l'action. Je veux que mon art soit engagé afin qu'il allie mon désir de communiquer mes préoccupations à l'égard de l'environnement et le geste concret qui donne l'exemple.»
Véronique Doucet est convaincue que la reforestation peut aider grandement à la restauration des parcs à résidus miniers laissés à l'abandon depuis plusieurs années. Le premier volet du projet consistera donc à reboiser, sous une performance artistique et scientifique, une partie du parc à résidus miniers. 3000 arbres seront plantés sur une étendue de boue composée de matière résiduelle fertilisante afin de rendre le sol plus alcalin et propice à l'implantation d'une vie végétale. Cette nouvelle végétation pourra diminuer l'impact du transport éolien des résidus en plus de stabiliser la surface. Des interprètes vêtus de blanc exécuteront une danse militaire. L'effet visuel sera créé par la démarche synchronisée et par la souillure progressive des vêtements par le milieu.
Le second volet vise la création d'une vidéo expérimentale présentant ce lieu a apparence de désastre humain. Elle dénoncera l'impact néfaste de ces sites miniers dits orphelins.
Enfin, la vidéo sera présentée dans un lieu public dans le cadre d'un évènement artistique environnemental.
«J'ai choisi ce site orphelin parce que des gens vivent autour du lac Dasserat. Ce site est considéré comme l'un des plus dangereux pour l'environnement. Ma famille s'alimente, en partie, de chasse et de pêche. Que penser des risques pour la santé de ces habitants et sur la chaîne alimentaire? Qu'en est-il de la santé des animaux, de l'avenir de la chasse et de la pêche dans notre région... ces activités génèrent la presque totalité des revenus du tourisme en Abitibi-Témiscamingue.»
Jusqu'à maintenant, le projet de Véronique Doucet est appuyé financièrement par cinq partenaires: le Conseil des Arts et Lettres du Québec, le CRÉAT, la Chaire de recherche du Canada (Restauration des sites miniers abandonnés), la Forêt de demain et les entreprises EnviroForêt. Toutefois, la venue de partenaire financiers supplémentaires sera nécessaire pour couvrir les frais de transport de plus de 7000$ de la matière résiduelle fertilisante. Cette boue de papetière représente l'élément de base à la création d'un sol propice à la plantation.
Article paru dans le journal Ensemble
pour bâtir, novembre 2004.
Cet article a obtenu un prix de l'AMECQ
(Association des médias écrits communautaires du Québec), en 2005 :
"Meilleure entrevue",dans la catégorie des journaux publiant des éditions
de 4000 exemplaires et moins.
Articles complémentaires :
Plantation d'arbres à Aldermac, parc à résidus miniers abandonné
A découvrir : Véronique Doucet, un pas à la fois
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